La victoire de Freyja

J’ai écrit en octobre 2019 un article de blog à propos de Freyja Haraldsdóttir (les combats de Freyja) qui est pour moi une grande leçon de vie.

En bref, Freyja est, en conséquence d’une forme sévère de la maladie des Os de Verre, très lourdement handicapée, soit  une grosse tête et deux bras atrophiés posés sur une planche. Mais aussi un parcours exceptionnel : master en études du genre, membre de la Commission constitutionnelle en charge de revoir la loi fondamentale islandaise, députée suppléante, professeure. Et engagée dans tous les combats contre les discriminations, pas seulement comme elle le souligne celles dont les personnes handicapées sont couramment victimes.

Mon article évoquait surtout sa volonté d’accueillir un enfant et les obstacles rencontrés depuis 2014 pour en avoir le droit. Car le sujet n’est pas simple : peut-on autoriser une personne aussi lourdement handicapée à prendre la charge d’un enfant ?  Ce dernier ne risque-t-il pas d’être la victime d’une démarche égocentrée ?  Ces questions, les tribunaux islandais se les sont posées, d’abord pour autoriser Freyja à suivre la formation à la parentalité, obligatoire, puis pour l’autoriser à prendre la charge d’un enfant. Et les réponses ont été différentes selon les instances, tant le sujet est sensible, ce qui a conduit Freyja et ses ami(e)s à un combat de sept années devant plusieurs niveaux de juridiction. Pour qu’enfin elle obtienne gain de cause : elle pourrait être « famille d’accueil » (fósturforeldri). Et qu’à la fin de l’été 2021 lui soit proposée la garde de Steve, adolescent ghanéen de 15 ans, arrivé en Islande comme jeune enfant réfugié, déjà passé par plusieurs structures d’accueil.

L’expérience de Freyja est l’objet d’un entretien paru dans le journal Vísir le 10 mai :

Premiers contacts ?

« Ils ont été pour moi à la fois merveilleux et inquiétants. Cela a été plus difficile pour lui. C’est toujours un choc, et difficile de revoir ses habitudes en changeant de domicile, de famille, d’école et d’environnement. Il n’est pas facile de se mettre à sa place mais il s’est bien très bien comporté. Il était prêt à venir. Il s’est aussitôt habitué à moi. (…)

 J’ai l’expérience d’appartenir à un groupe marginal, de devoir dépasser les préjugés, de dépendre de mon entourage, d’être souvent impuissante. Ce sont des sensations qu’il a dû vivre à sa façon. Malgré les différences, cela m’aide beaucoup de comprendre d’où il vient et pourquoi il se comporte de telle ou telle façon. Ainsi pouvons-nous construire des ponts entre nous. C’est quelque chose que je ne connaitrais pas si je n’étais pas handicapée. Nous échangeons souvent à ce propos.

As-tu envie de l’adopter ?

Ce n’est peut-être pas une question pour moi. Il a sa mère, des frères et sœurs, et en Islande l’adoption contraint à rompre les liens légaux avec la famille biologique. Les enfants accueillis viennent d’autres familles, et ce n’est pas évident de reprendre leur éducation ; c’est déjà une grande responsabilité.»

… dit Freyja, heureuse de penser à quelqu’un d’autre qu’elle même !

Où elle confirme que pour les personnes en grande difficulté il n’est pas de plus grande satisfaction et donc de source de progrès que d’aider les autres.

2 réponses sur “La victoire de Freyja”

  1. Et quel courage ! quelle volonté ! c’est en effet une leçon de vie remarquable comparée aux événements que le monde connaît actuellement !

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