Élections locales en Islande : à chaud !

Je sais que tous les lecteurs de ce blog sont avides de connaître les résultats des élections locales qui ont eu lieu samedi dernier. Les voici, à chaud !

Ce 14 mai en effet les Islandais et étrangers en ayant le droit (tous ressortissants des pays Nordiques et les autres étrangers ayant 3 années de séjour sur l‘île) pouvaient voter pour le renouvellement des conseils des 69 collectivités territoriales de l’île, soit 277127 inscrits. Dont la répartition est très déséquilibrée, allant de 100405 pour Reykjavík et 177815 si l’on inclut les collectivités formant la région de la capitale, à quelques dizaines dans certaines collectivités, par exemple 5259 inscrits dans les 9 collectivités des fjords de l’ouest et nord-ouest. On comprend que dans celles-ci les choix se fassent plus en fonction des relations interpersonnelles que selon les étiquettes partisanes. C’est pourquoi il y a un bon nombre de listes locales et parfois une seule liste.

De telles disparités rendent toute analyse nationale peu significative. Cette année pourtant les résultats se caractérisent par une remarquable victoire du parti du Progrès, déjà visible à l‘occasion des élections législatives du 25 septembre. J’y reviendrai dans un prochain article. Voyons aujourd’hui quelques résultats locaux, notamment ceux de Reykjavík.

Dagur ; « tout n’est pas perdu: »

Voici quatre ans le maire Dagur B. Eggertsson (Alliance Social-démocrate) avait dû pour garder son poste[1] composer une alliance associant Redressement, les Pirates (2 sièges chacun), et la Gauche Verte (1 siège) aux 7 que sa liste avait obtenus, soit 12 sièges sur 23. Majorité « improbable » mais que Dagur avait été assez habile pour faire durer. Au prix peut-être de trop de compromis ?  Sa liste perd 2 sièges et Redressement 1, alors que les Pirates passent de 2 à 3 sièges, assez loin de ce qu’ils espéraient. Quant à la Gauche Verte, parti de la Première Ministre, elle réussit, tout en perdant des voix, à préserver son seul siège. Donc Dagur a perdu. Tout comme son principal opposant, le parti de l’Indépendance, qui tombe de 8 à 6 sièges, mais garde le droit de dire qu’il est encore le premier parti de la capitale, longtemps sa chasse gardée. On a compris que le vainqueur est le parti du Progrès, qui de 0 siège passe à 4, d’une telle ampleur que sa tête de liste Einar Benediktsson s’en dit surpris. Le voici donc maître du jeu.

Einar entouré des ministres Lilja Alfreðsdóttir et Ásmundur Einar Daðason

Mais il n’y a pas que Reykjavík : le Framsókn (petit nom pour Framsóknarflokkur – parti du Progrès) gagne de 1 à 2 sièges dans chacune des 6 autres communes de la région-capitale. Au niveau national, de 8.5% des voix et 45 sièges en 2018, il passe à 18% et 67 sièges !  Seul Akureyri échappe partiellement à la vague, ce qui est d’autant plus étonnant que le nord de l’île a été le berceau du mouvement coopératif islandais et que le parti du Progrès, alors agrarien, était son expression politique ! La liste locale obtient 18.7% des voix et 3 des 11 sièges, suivie par le parti de l’Indépendance 18% et 2 sièges, comme le parti du Progrès 17% et 2 sièges. Quatre autres partis obtiennent chacun 1 siège.

Étonnante résurrection que celle du Framsókn, plus vieux parti politique de l’île, proche de la disparition voici quelques mois, après la scission de Sigmundur Davíð Gunnlaugsson et son parti du Centre. Elle tient beaucoup à la personnalité bonhomme de son président Sigurður Ingi Jóhannsson, malgré une énorme bourde raciste rapportée ici (voir Bruit et Fureur en Islande) et qui l’a contraint à se mettre en retrait ; elle tient aussi au travail des deux autres ministres du parti présents dans le précédent gouvernement et au choix d’un positionnement très centre-social.

Une histoire passionnante, sur laquelle je reviendrai le mois prochain.

Autre constat : la progression de l’abstention, de 32% en 2018 à 37%. C’est un problème, surtout si l’on considère l’importance de la décentralisation et de la vie locale en Islande. Même à Reykjavík où la bataille s’annonçait chaude autour d’enjeux importants pour l’avenir de la ville (logements, transports en commun…), le taux de participation n’a été que 61.1%, soit une chute de 5.9%. Certes les bureaux de vote se sont vidés en fin d’après-midi au moment de la prestation du groupe islandais à l’Eurovision, mais cette explication est insuffisante !

Et puis il y a évidemment eu un tremblement de terre, annonciateur probable d’une nouvelle éruption volcanique !


[1] En Islande le Maire est choisi par le Conseil Municipal soit en son sein soit sur appel public de candidatures

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