Nous voici à mi-chemin d’élections prévues le 30 novembre. Les discours vont bon train, ainsi que les sondages. Et ceux-ci, comme on pouvait s’y attendre, font apparaître des tendances inhabituelles, et qui peuvent encore évoluer.
Parmi ces sondages l’un d’eux devrait servir de référence à la construction des programmes : « qu’est-ce qui est important ? » En date du 7 novembre Gallup publie une enquête par laquelle il a été demandé aux personnes interrogées de citer les 5 sujets les plus importants à leurs yeux. Les résultats peuvent être classés en trois catégories : en tête entre 61 et 69% : la santé, la situation économique et le logement. Viennent ensuite, entre 36 et 30%, l’éducation, les communications, les immigrés et les personnes âgées. Enfin, entre 17 et 20%, sont cités l’environnement, les demandeurs d’asile et la jeunesse. Lorsqu’un seul choix peut être cité, l’économie (26%) vient avant la santé (19%), alors que l’immigration et l’environnement ne sont cités que par 5% des personnes sondées.
Ce 15 novembre, les partis apportant des réponses à ces sujets de préoccupation ont ils les faveurs de l’électorat ?
Ces sujets dominent pour deux des partis placés en tête : Alliance Social-Démocrate et Redressement qui, à entendre leurs porte-paroles, pourraient facilement faire alliance. Ils sont aussi cités par le parti du Peuple et le parti Socialiste, mais le premier y ajoute une opposition à l’accueil de réfugiés. Cette opposition est au cœur du programme du parti du Centre : « pas un seul réfugié ! », auquel Sigmundur Davíð Gunnlaugsson ajoute pour faire bonne mesure une baisse des impôts et une réduction des dépenses, selon une recette qui vient de réussir à son modèle américain. Quant au parti de l’Indépendance il semble croire qu’il reprendra le terrain perdu au profit du parti du Centre en copiant son programme. Ce choix explique la perte de terrain au profit de Redressement. A l’inverse le parti du Progrès, que l’on croyait réticent à l’immigration au nom des valeurs traditionnelles de l’Islande, fait un virage qui surprend : « reproche-t-on aux immigrés de ne pas parler islandais ? Il suffit de le leur apprendre » s’exclame Sigurður Ingi Jóhannsson, son président. La Gauche Verte, troisième parti de la coalition jusqu’à son récent départ, se bat pour sa survie et revient à l’un de ses fondamentaux : sortir de l’OTAN. Mais le neutralisme peut-il payer en ces temps de guerre ? Tous ces partis sont quasi-muets sur une éventuelle adhésion à l’UE.
Est-ce si important ? L’électeur islandais ne va pas voter pour un programme que l’on distingue mal d’un autre mais pour des personnalités, celle qui localement lui est proche et celle qui dirige le parti. Ceci apparaît clairement par son contraire pour deux partis, l’Alliance Social-démocrate qui, toujours en tête des intentions de vote, n’a cessé de perdre du terrain tant sa nouvelle présidente, Kristrún Torfadóttir, d’abord portée au pinacle, a déçu par son manque de charisme et ses maladresses de communication. Ça l’est plus encore pour les Pirates qui se refusent à toute incarnation par respect d’une règle fondatrice du mouvement européen dont ils sont issus : pas de président(e). C’est oublier que le mouvement est né en Islande en 2013 et a été porté à 30% des intentions de vote par une personnalité d’un charisme exceptionnel : Birgitta Jónsdóttir.
Il y a au total 1282 candidats dans les 6 circonscriptions, soit 0.5% des inscrits, répartis en 61 listes dont 24 sont conduites par des femmes. Le scrutin a lieu à la représentation proportionnelle dans chacune des circonscriptions avec répartition des restes à la plus forte moyenne. Toutefois, dans le souci d’être aussi juste que possible une nouvelle répartition des restes a lieu au niveau national pour l’attribution de sièges réservés à cet effet. Les partis n’ayant pas obtenu 5% des suffrages exprimés sont éliminés.
Pour ce scrutin les listes présentées par chaque parti, qu’elles aient été construites directement ou à la suite de primaires, laissent présager, quels que soient les résultats, l’arrivée de personnalités « civiles » qui ont fait l’actualité de ces dernières années, par exemple Ragnar Þór Ingólfsson, en congé de la présidence de VR le plus grand syndicat islandais, pour prendre la tête d’une liste du parti du Peuple, ou Solveig Anna Jónsdóttir (Efling) sur une liste du parti Socialiste. Autres exemples : ceux de Alma Möller et Þórolfur Guðnason, deux membres du trio qui s’est illustré lors de la crise du Covid, engagés l’une à l’Alliance social-démocrate, l’autre dans Redressement.
On doit donc s’attendre à un Alþingi bien différent de celui que Bjarni Benediktsson, Premier Ministre et président du parti de l’Indépendance a décidé seul de dissoudre. Est-ce ce qu’il voulait ?
Comme partout : « It’s the economy, stupid ! »
p.s. : petite faute de frappe : Kristrún Torfadóttir
Plus qu’une faute de frappe une énorme erreur ! Kristrún Frostadóttir. Toutes mes excuses !